En 1923, lorsqu’on lui a demandé pourquoi il voulait escalader le mont Everest, l’alpiniste britannique George Mallory a répondu : « Parce que c’est là. »
Cette réponse existentielle pourrait également aider à expliquer le choix bouleversant d’un ingénieur en robotique parisien de gravir les imposants sommets des Alpes françaises dans « La Montagne », un regard curieusement fascinant sur l’obsession tranquille d’un homme.
Pierre, interprété par le réalisateur du film Thomas Salvador (il a également co-écrit avec Naïla Guiguet), est une âme apparemment solitaire qui participe à une conférence de travail près de Chamonix, une station balnéaire pittoresque au pied de l’imposant Mont Blanc. Bien que Pierre réservé, pensif et digne semble en paix avec ses collègues, nous apprenons peu de choses sur sa vie ou son parcours actuel, tant au début qu’au fur et à mesure du film. Bien que cette vanité puisse frustrer certains téléspectateurs, elle donne à ce conte aux allures de fable une plus grande place pour l’interprétation.
A la fin de la conférence, Pierre décide de rester camper un peu sur le massif du Mont Blanc. Mais peu de temps après, alors qu’il s’apprête à prendre le train pour rentrer à Paris, quelque chose l’empêche de rentrer chez lui. Il se rend au travail « malade » et reste explorer les Alpes, plantant sa tente bancale dans une zone escarpée et enneigée avec plusieurs autres alpinistes intrépides.
Pierre semble être un grimpeur assez compétent et imperturbable. Mais le vaste et étrange éloignement de son lieu situé à une hauteur vertigineuse (magnifiquement filmé par Alexis Kavyrchine), ainsi que le plan de Pierre d’atteindre un glacier en train de fondre au sommet d’une montagne, suggèrent que l’histoire pourrait virer vers un territoire d’action-survie à la manière de films tels que “Wild”. Into the Wild » ou le drame de Naomi Watts de l’année dernière « Infinite Storm ». Mais « La Montagne » est bien plus elliptique que cela. Et, même si les intentions de Pierre restent discutables, l’histoire devient un subtil traité sur la solitude, l’écologie et, semble-t-il, la poursuite de votre bonheur.
Louise Bourgoin dans le film « La Montagne ».
(Libération de brin)
La relation de Pierre avec Léa (une lumineuse Louise Bourgoin), une chef locale de plus en plus sympathique qu’il rencontre en chemin, est l’une des rares concessions du film à une histoire plus traditionnelle. Il insuffle au voyage une dimension émotionnelle bienvenue mais discrète puisque Pierre et Léa, une mère célibataire qui peut également être aux prises avec la solitude, développent une douce attirance.
Une tentative moins réussie d’intrigue secondaire voit Pierre faire un déversement mineur sur la montagne. C’est suffisant pour nécessiter un sauvetage par hélicoptère et une visite à l’hôpital, mais cela ressemble à une transition superficielle.
Une transformation intrigante et énigmatique en territoire de science-fiction surgit également lorsque Pierre découvre un groupe de petites entités lumineuses vivant dans les coins et recoins des montagnes. Ces êtres (Salvador les appelle « lueurs »), qui ressemblent à des poufs furtifs et pailletés, finissent par partager leur capacité de briller avec Pierre lorsqu’ils établissent un contact physique. Ce que représentent exactement ces étranges créatures peut être vu par le spectateur, bien que les allusions au changement climatique et à l’érosion des Alpes fournissent un indice.
Tout cela mène à un intermède trippant dans lequel un Pierre brillamment éclairé est aspiré dans une montagne glacée et flotte de manière amorphe à l’intérieur de ses murs. Les effets visuels de style local confèrent ici à la séquence un attrait confortablement low-tech qui persiste jusqu’à la fin alors que Pierre, maintenant fréquemment illuminé, accepte ostensiblement son existence.
Bien que « La Montagne » se déplace à un rythme quelque peu glacial, cela devient une expérience plus immersive que fatiguante. Et si trop de moments restent sous-expliqués (comment la mère et les frères de Pierre sont-ils arrivés si vite dans les Alpes pour leur brève visite semblable à une intervention ?), Salvador insuffle au film un ton suffisamment surréaliste pour justifier son approche narrative austère.
‘La montagne’
En français, sous-titré en anglais
Non classé
Durée de fonctionnement : 1 heure, 53 minutes
Jouant: Ouverture le 15 septembre à Laemmle Glendale