Le Metropolitan Museum of Art de New York expose une toile restaurée intitulée “Bélizaire et les enfants Frey”. Cette peinture de 1837 révèle un jeune esclave noir qui avait été effacé par une couche de peinture pendant plusieurs décennies.
Le tableau “Bélizaire et les enfants Frey” a été acquis par le Metropolitan Museum of Art (Met) au printemps et sera exposé dans ses salles. L’histoire de cette toile commence en 1837 à La Nouvelle-Orléans, lorsque le banquier et marchand Frederick Frey commande un portrait à Jacques Amans, un portraitiste français renommé. Ses trois enfants, Elizabeth, Léontine et Frederick Frey Jr., posent joyeusement sur fond de bayou. Ce qui surprend, c’est la présence d’un jeune esclave rêveur qui domine la composition, ainsi que son traitement pictural soigné, inhabituel pour l’époque. Cet enfant est alors inconnu.
Au fil des décennies, la toile est maltraitée par les descendants des Frey, puis, en 1973, elle est donnée au New Orleans Museum of Art (NOMA). Mais le jeune Noir est tout simplement effacé, fondu dans le décor. Personne ne sait qui a fait cela ni pourquoi. Bien que son fantôme soit encore visible sous les coups de pinceau, le NOMA remise la toile jusqu’en 2005, année où elle est revendue par Christie’s à un antiquaire de Virginie. Après une lourde restauration, le garçon noir réapparaît, mais son identité reste inconnue.
En 2013, le collectionneur Jeremy K. Simien découvre par hasard des photos avant-après de la toile en ligne et devient obsédé par l’identité de ce jeune homme. En 2021, il localise le tableau, l’achète à un collectionneur de Washington, puis engage l’historienne louisianaise Katy Morlas Shannon pour remonter son histoire. Ils découvrent qu’il est né en 1822 d’une mère esclave achetée par les Frey comme cuisinière. Il grandit près des enfants Frey et devient leur gardien. Mais à la mort du patriarche, il est vendu et sa trace se perd. Son prénom est Bélizaire.
Le Metropolitan Museum of Art a acquis cette toile pour rompre avec l’histoire de l’art américaine romantisée. Selon une conservatrice du musée, il est temps d’exposer les racines des inégalités systémiques, en particulier après le mouvement Black Lives Matter. Le NOMA reconnaît une erreur et évoque le manque de moyens, ce qui suscite la colère des experts. Les réseaux sociaux regorgent de questions. Et si Bélizaire était le fils illégitime du père Frey, un cas fréquent dans les familles esclavagistes ? A-t-il survécu à la guerre de Sécession ? A-t-il connu la liberté ? Aujourd’hui, il accède à la postérité, offrant une consolation, sinon une réparation.
Source: Le Monde
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J’ai hâte de découvrir les secrets cachés derrière ce célèbre tableau au Met !